Ref. : maur-6174
- Ce festival, insiste avec gravité Sidi Ould Cheikhna Ould Khairy responsable de la promotion à l'Office National Mauritanien du tourisme, a été fait pour rappeler que cette ville est en train de disparaître, que les gens vont aller vers là où il y a de la nourriture, vers là où il y a du pain, là où ils peuvent travailler ; ils vont la quitter, et ce patrimoine , sera complétement détruit, perdu.
Le décor est planté. Classée zone rouge depuis 2007 par le Quai d’Orsay suite aux menaces terroristes qui planent sur une partie du Sahel la région a vu s'effondrer une économie essentiellement basée sur le tourisme depuis que l’insécurité alimentaire reste chronique en Afrique de l’Ouest et au Sahel.
Ref. : maur-6182
Ref. : maur-6185
Le ciel est jaune, la lumière diffuse. Les palmiers dattiers, seconde richesse de l’ancienne cité caravanière après les manuscrits anciens conservés par des générations d’érudits, ont entamé leur danse nuptiale rythmée par de fécondes bourrasques qui transportent le pollen d'arbres en arbres.
Au sommet du village, les raïmas dressées à l’occasion sur la grand’ place, près de la maison de la culture où se réunissent aujourd'hui les érudits, viennent d’être plaquées au sol par les festivaliers avant que le vent ne les souffle.
Ce matin, le Président Mohamed Ould Abdel Aziz a inauguré le festival. Son portrait est présent dans toute la ville. Les militaires aussi, sécurité oblige.
Ref. : maur-6191
Des Français, des Belges, c’est vrai, ça fait bien longtemps que les habitants de Wadane n’en avaient vu en aussi grand nombre.
Peu de voyageurs se sont en effet aventurés ces dernières années, dans cette région : « formellement déconseillée aux voyageurs ».
Cent trente européens ont néanmoins répondus présents à l’appel de Maurice Freund - voyagiste atypique, créateur de Point-Afrique et des Tours Opérateurs : La Balaguere, Voyageurs du Monde, Club Aventure, Atalante, Allibert qui détiennent à eux six 95% du marché mauritanien du tourisme.
Maurice Freund est reconnu par les gens d’ici pour avoir fait naitre dans la région un tourisme concerné dans les années 90.
Un tourisme qui a favorisé le développement de la région et contribué à fixer la jeunesse dans les oasis.
En 1994, deux ans avant le démarrage du tourisme, le pourcentage de population de l’Adrar vivant en dessous du seuil de pauvreté était de 56%. Sept ans après, en 2001, il était descendu à 23% .
Ref. : maur-6170
Rappel des événements liés au terrorisme dans la zone sahélienne : source : Le Monde.fr
24 décembre 2007 Quatre touristes tués et un grièvement blessé près d'Aleg (sud de la Mauritanie), à 250 km de la capitale Nouakchott.
2008 Menaces contre le rallye Paris-Dakar. Assassinat d'un Français à l'est d'Alger le 8 juin.
2009 Un kamikaze se tue devant l'ambassade de France à Nouakchott, le 8 août. Le 26 novembre, enlèvement de Pierre Camatte au Mali (libéré le 23 février 2010).
2010 AQMI revendique, le 25 juillet l'exécution de Michel Germaneau au Mali, après un raid manqué de la DGSE et de l'armée mauritanienne.
16 septembre, enlèvement de cinq Français, d'un Togolais et d'un Malgache sur le site d'Areva à Arlit au Niger (libération de trois d'entre eux le 24 février 2011).
Le 27 octobre, sur Al Jazira, message d'Oussama Ben Laden justifiant les enlèvements de Français au Sahel.
2011 Le 7 janvier, enlèvement et assassinat de Vincent Delory et Antoine de Léocour à Niamey (Niger).
Le 24 novembre, enlèvement de deux Français à Hombori au nord du Mali.
Ref. : maur-6220
Pour ce voyage, tout est parti il y a trois mois, m’explique notre guide Sid’ahmed, d’une revendication des guides de l’Adrar, témoins impuissants ces dernières années de l’effondrement économique de leur région.
Ils ont demandé au gouvernement mauritanien d’agir et de ne pas laisser la situation se dégrader encore d’avantage. C’est ainsi que Maurice Freund de Point Afrique fut sollicité par le gouvernement mauritanien pour affréter un avion.
Le Point-Afrique est l’initiateur des vols charter sur Gao (1995), Agadez (1996), Atar (1997), la Libye (1999), Tamanrasset (2000), Djanet (2001), Timimoune (2008)
Ref. : maur-6238
Le vol a été payé intégralement par le chef de l’état mauritanien dans le but de renouer le contact avec les différents T.O. (Tours Opérateurs) français et la presse, ceci pour appuyer la population déjà très affaiblie par la sécheresse et combattre la pauvreté.
L’objectif : montrer que la région est maitrisée sur le plan sécuritaire et que le tourisme peut reprendre.
le 11 novembre 2011, au terme de leur mission (la 3ème réalisée en cinq ans), Gérard Guerrier, directeur général d’Allibert et responsable de la commission sécurité d’ATR soulignait que « si le niveau d’alerte est monté d’un cran (menaces proférées par Al-Qaida au Maghreb islamique - AQMI, ndlr), il nous semble que le niveau de protection est monté de deux crans avec une amélioration sensible de la sécurité des groupes organisés de touristes dans la région de l’Adrar ».
Ref. : maur-6252
Maurice Freund :
Algérie, Niger, Mali : les problèmes sont similaires dans ces trois pays, où les gouvernements n’accordent aucune confiance à leurs ressortissants touaregs (et vice-versa). Alger se méfie du sud, Bamako et Niamey se méfient du nord. Les deux rébellions touarègues de 1990 et de 2007 n’inspirent pas - de part et d’autre - une franche coopération.
Plus grave : les touaregs sont divisés (on les a divisés pour mieux régner ?). Certains chefs de ces rebellions se sont vu offrir des postes importants dans les administrations et les ex-combattants de base ont été laissés pour compte. Cela crée des frustrations, de la jalousie, voire de la haine.
Pire : une certaine élite aux gouvernes de ces pays, trempe dans les divers trafics cités. Les sommes d’argent générées sont colossales et chacun y trouve son dû. AQMI joue les «parrains» en protégeant ces activités illégales et prélève sa dîme. Des complicités s’installent.
L’extrême pauvreté et l’absence d’avenir servent de catalyseur aux jeunes pour lesquels il n’y a plus foi, ni loi. En perte d’identité et de dignité, leur haine de l’Occident - vu comme le prédateur de leurs ressources minières - enfle. (Voir à ce sujet l'ouvrage prémonitoire de Jean Ziegler, «La Haine de l'Occident», N.d.l.R.)
Les associations humanitaires officiant dans ces régions se replient et les populations locales, seules capables d’enrayer l’actuel processus, se sentent abandonnées. La spirale infernale est en marche! Surtout avec la dernière «solution» trouvée : la force !
Les touristes ne viennent plus, les ONG et les ressortissants français résidant dans le nord du pays s’en vont... le vide s’installe !
Mais les militaires français débarquent, et l’exploitation des mines et la prospection pétrolière continuent... Principalement visible à l’hôtel principal de Niamey (en tenue de combat, s.v.p !), la présence de nos militaires sur le sol nigérien est ressassée en boucle par les chaînes de télévision. Quelle humiliation pour un pays souverain ! C’est ce sentiment que j’ai éprouvé tout au long de ma semaine passée au Niger fin septembre.
Le cas de la Mauritanie apparaît bien différent.
Déjà, il n’y a pas de problème de confiance entre le nord et la capitale. C’est le seul pays où les tribus nomades sont maîtresses de leur destin.
S’il est vrai que l’avant-dernier gouvernement avait, pour des raisons d’équilibre politique, une tendance à fermer les yeux, voire à favoriser certains partis prônant un régime islamiste, il n’en est plus de même aujourd’hui. Le nouvel homme fort, le général Aziz, s’est engagé dans une lutte sans merci contre l’intégrisme et ses violences. Il agit de manière assez efficace en jouant sur trois leviers :
Lutte contre la pauvreté : un ensemble de mesures sont prises en faveur des quartiers défavorisés de Nouakchott où il se rend régulièrement, tel que l’adduction d’eau et autres commodités.
Mobilisation d’imams : cinq cents d’entre eux ont été missionnés pour contrer les prêches extrémistes et salafistes.
Action militaire : l’armée dispose de véhicules neufs, de stocks de carburants et les consignes sont strictes. Si la totalité du pays n’est pas encore quadrillée, d’importantes zones sont quasi hors de portée d’une quelconque intervention d’AQMI.
L’armée mauritanienne, accusée par AQMI d’être un «suppôt de l’Occident», quitte son territoire pour attaquer les bandes terroristes de l’émir Mokhtar Belmokhtar qui opère à la frontière algéro-mauritanienne.
Action du Point-Afrique dans l’Adrar mauritanien :
A l’automne dernier, après consultation du Premier Ministre mauritanien, nous avons pu engager - en concertation avec les autorités chargées de la sécurité - une formation de tous les guides de l’Adrar, qui ont été équipés de balises Argos.
La configuration géographique de l’Adrar mauritanien a été soigneusement étudiée. Seuls cinq passages permettraient de sortir de la zone en cas de prise d’otages. Les procédures d’intervention rapide de la gendarmerie permettent de faire échouer toute tentative d’enlèvement. Et la population locale, à l’inverse des pays voisins, coopère avec les autorités et assure une veille sur la circulation de tout étranger.
Ref. : maur-6246
Le premier soir, alors que l’immense Raïma dressée pour accueillir tout ce monde à Wadane, résiste au vent, Maurice Freund discute avec les différents Tour-Opérateurs présents.
L’un d’eux : - Nous on est des T.O., le développement local est une conséquence de notre activité touristique, tandis que pour le Point-Afrique et d’autres associations, l’objet c’est le développement, et le tourisme un moyen pour y parvenir.
Maurice Freund : - pour moi, l’entreprise c’est pas la finalité, l’entreprise c’est l’outil. Point-Afrique, est une coopérative de voyageurs, on s’inscrit dans l’économie sociale. En fin d’année, quand il y a les bénéfices - et on en a fait des bénéfices, parce qu’on est partis de rien -, on les reverse à la coopérative. En l’espace de quinze ans, on a fait des fonds propres à hauteur de dix millions d’euros, c’est énorme. On vient de les bouffer complétement ces trois dernières années parce que j’ai maintenu l’activité, j’ai maintenu les vols, même sur Atar ! J’ai volé avec trente personnes dans l’avion ! Je n’ai arrêté qu’en janvier 2011, c’est tout récent. On prend des risques financiers énormes.
C’est aussi une histoire d’hommes, en Mauritanie, j’avais sympathisé avec Mohamed Salek Ould Heyyine, le patron de la SNIM, un homme remarquable. Il me parlait de ce qui lui tenait vraiment à cœur, de ces populations qui se vident dans ces oasis, et je lui ai dit, et bien, moi j’ai une solution : on peut faire du tourisme, parce qu’on avait fait l’opération sur Gao. C’est comme ça que le tourisme s’est développé ici en Mauritanie. Au départ, je ne voulais pas du tout faire du tourisme, mon idée c‘était : comment développer une région en apportant un avion, en désenclavant, et en s’appuyant sur une activité touristique ?
Fin septembre 2010, alors qu’il s’agissait de faire le point sur la situation sécuritaire de la zone sahélienne, Maurice Freund déclarait :
- Voici quelques mois, nous nous battions pour rester présents dans ces zones fragiles et déshéritées... Notre stratégie reposait sur une forte conviction : le tourisme peut être une arme pour la Paix ! Le Point-Afrique se doit, en raison des circonstances actuelles, de stopper net les 4/5e de son activité. Cette décision draconienne découle de l’accélération ces dernières semaines de la montée en puissance des cellules terroristes au sud de l’Algérie, au nord du Mali et du Niger.
Ref. : maur-6233
Je travaille depuis très longtemps avec les chameaux. J’ai commencé avec le tourisme dans les années 9O, jusqu’à 2007. Ca a changé beaucoup de choses pour moi.
Au début je n’avais qu’un petit troupeau de chèvres, et à la fin en 2007, j’avais un troupeau de chameaux, mes palmeraies, de l’argent, une boutique…
C’est de la création d’emplois pour nous le tourisme, c’est la possibilité d’avoir des revenus, des activités, de nous soigner… C’est avoir accès à l’aide humanitaire… Ca apporte beaucoup à la population, aux villageois, aux nomades… C’est tant de choses qu’on ne peut pas les énumérer… L’emploi, le commerce, la connaissance, le contact…
C’est un vrai bénéfice pour la population locale.
Ref. : maur-6229
Mais si cela redémarrait, on aurait aimé que l’Etat apporte son soutien à ce redémarrage dans toutes les branches du secteur.
Ce qu’on veut continuer, c’est ce que nous faisions avant : le tourisme solidaire, les randonneurs, les voyageurs. On ne connait pas ici le tourisme de masse.
J’ai mes photos dans les bureaux de "Terres d’aventure" en France et de "Hommes et montagnes". Mais je n’ai pas d’internet ici au campement, je n’écris pas… Si mes amis viennent, c’est bien, s’ils n’arrivent pas, qu’est-ce que je peux faire ?
Ref. : maur-6226
Aujourd’hui, il y a des problèmes sur le redémarrage du tourisme en Mauritanie, il faut à nouveau nous préparer, acheter des chameaux qu’on a perdu à cause de différentes raisons comme des maladies ou autre.
Ref. : maur-6206
Comme me répondait très justement un jeune cinéaste à qui je demandais pourquoi les mauritaniens ne se tournaient pas vers d’autres pays que la France qui les laissait de côté : - On ne choisit pas ses colonisateurs !
L’ensemble des pays européens en effet se calque sur les recommandations du Quai d'Orsay pour apprécier le degré de sécurité du pays. C’est ainsi que depuis que la Mauritanie a été classée zone rouge, les autres pays européens ont suivi, et plus personne n’est venu dans la région.
Résultat, nous résument plusieurs personnes sur place, les jeunes diplômés ont peu de choix : aller grossir les chômeurs des grandes villes mauritaniennes, prendre les pirogues, ou bien être tenté d'alimenter les réseaux terroristes alentour.
Les gens de l’Adrar se sentent abandonnés, eux qui ont tant misé sur le développement des infrastructures touristiques de leur région classée patrimoine mondial par l’UNESCO.
Pendant toutes ces dernières années de sécheresse, ils ont construit, aménagé, auberges, restaurants, boutiques… transformé leurs lieux d’habitation en sites d’accueil.
De 10 000 voyageurs par an, ils sont brutalement passés au chiffre zéro. Toute leur économie anéantie : les chameliers obligés de vendre leurs bêtes, les commerçants de fermer boutiques, les guides contraints de se débrouiller autrement, voir de quitter la région.
Le sentiment est celui d'une injustice d'autant plus que si l'on ne peut nier certains risques , il ne s'est rien passé à proprement parlé dans la région de l'Adrar.
Ref. : maur-6256
Le 28 septembre 2010, l’équipe de Point- Afrique déclarait :
- Aujourd’hui plus que jamais, il nous apparaît impensable de déserter le champ des relations Nord-Sud et de l’abandonner aux seuls bruits de bottes, aux seuls intérêts cupides qui semblent désormais la marque de fabrique d’une certaine politique française, et plus largement mondiale.
Il est certain que le voyage, au delà des échanges commerciaux, induit aussi des amitiés qui vont bien au delà des politiques gouvernementales de nos pays respectifs :
- Nous voulons apporter notre solidarité à nos amis mauritaniens, reprend Vincent Fontvieille (La Balaguère). Ils payent très cher la décision de notre gouvernement d’inscrire la région d’Atar en zone orange et la ville de Chinguetti en zone rouge…
Ref. : maur-6263
Yahya Ould Rajel, conteur :
- Je me rappelle bien au tout début du tourisme, nous n’avions pas assez de boutiques et d’épiceries à Atar, la capitale de la région. Deux années plus tard, ça avait poussé comme des champignons. Six années plus tard, on ne pouvait plus reconnaître Atar. Le tourisme a changé le visage de la région.
Sidi Ould Khali de l'Office national du tourisme
ajoute :
- le développement du tourisme dans cette région nous a permis de freiner l’émigration de la jeunesse mauritanienne vers l’Europe.
Les jeunes ont trouvé un travail rémunérateur ici, ils se sont fixés. Les premières années ont été des années très riches, ils ont vu le tourisme se développer dans leur pays, cela a encouragé de nombreuses entreprises, par exemple l’agriculture maraichère.
Il y a maintenant énormément de personnes en Adrar qui travaillent dans les jardins, ils vendaient leurs produits aux hôtels, aux auberges, l ‘élevage ovin s’est développé pour la viande, c’est l’effet transversal du tourisme, et soudain, tout s’est arrêté.
Ça a causé beaucoup de dégât dans la région, et les gens trouvent que c’est injuste car ici on a pas connu un seul cas de terrorisme, vous pouvez vérifier.
Nous comprenons que le gouvernement français se soucie de la sécurité de ses concitoyens, mais nous aussi, étant les receveurs de ces gens qui font des entrées économiques, nous sommes encore plus attentifs à leur sécurité, au même niveau voir plus que le gouvernement français.
Ils sont notre pain, ils nous font vivre, ce qui touche à leur sécurité de près ou de loin nous concerne donc au premier plan. Nous avons été les premiers à lancer un cri.
Nous vivions du tourisme, et quand le tourisme s’est arrêté, on s’est retrouvé face à la pauvreté. Nous avons lancé ce cri pour que notre gouvernement multiplie la sécurité dans la zone. Ce qui a été fait ces dernières années, aujourd’hui la zone est très sécurisée.
Malheureusement on continue à avoir une réticence côté français, et nous ne comprenons pas.
Le 28 septembre 2010, l’équipe de Point- Afrique déclarait :
- Aujourd’hui plus que jamais, il nous apparaît impensable de déserter le champ des relations Nord-Sud et de l’abandonner aux seuls bruits de bottes, aux seuls intérêts cupides qui semblent désormais la marque de fabrique d’une certaine politique française, et plus largement mondiale.
Il est certain que le voyage, au delà des échanges commerciaux, induit aussi des amitiés qui vont bien au delà des politiques gouvernementales de nos pays respectifs :
- Nous voulons apporter notre solidarité à nos amis mauritaniens, reprend Vincent Fontvieille (La Balaguère). Ils payent très cher la décision de notre gouvernement d’inscrire la région d’Atar en zone orange et la ville de Chinguetti en zone rouge…
Ref. : maur-6284
Chinguetti aux allures de ville fantôme, Chinguetti délaissée, se laisse inexorablement ensevelir par le sable.
Chinguetti a été fondée au XIIe siècle tout près d'un petit site d'oasis du VIIe siècle aujourd'hui entièrement enfoui sous le sable. La ville, qui s'est développée autour de sa mosquée, de part et d'autre de laquelle s'installèrent deux puissants clans, devint un point de ralliement important pour les pèlerins qui se rendaient à La Mecque. Chinguetti bénéficia aussi de la production et de l'exportation du sel d'Idjil, située à quelques kilomètres plus au nord. Elle connut son apogée aux XVIIe -XIXe siècles, essentiellement en raison de sa prééminence religieuse et de l'importance de ses écoles, qui contribuèrent à accroître encore son rôle commercial. Comme Wadane, Chinguetti souffrit des raids marocains, mais moins sévèrement. L'attraction exercée par le développement du site minier de Zouerate-Nouadhibou, puis la guerre du Sahara (1975-1979) entraînèrent le dépeuplement de Chinguetti et de Wadane.(source : http://whc.unesco.org/pg.cfm?cid=31
Ref. : maur-6295
Ref. : maur-6345
Derrière les murs de pierres de cette battisse à l’abri du vent de sable, notre guide Sid Ahmed nous mène à la rencontre de Melainine Ould Mohamed El Wali. L'homme est le conservateur du petit musée, de la bibliothèque familiale étudiée par Théodore Monod, et gérant de l'auberge du Bien-être à Chinguetti.
A notre question : "- Avez-vous vous ressenti un jour la présence du terrorisme en Adrar ?"
Melainine Ould Mohamed El Wali répond :
"- On ne sent pas le terrorisme, et on ne le trouve pas. Ce qui est bizarre, c’est que rien ne s’est passé ici en Adrar. Rien du tout."
Ref. : maur-6302
Melainine Ould Mohamed El Wali :
"- Cette année-ci, tout comme les deux précédentes, la situation est très dure ; ce n’est pas difficile uniquement pour nous les gens de Chinguetti, c’est difficile pour toute la région de l’Adrar.
Ici, l’économie est basée sur l’agriculture. Ces dernières années, nous avons eu la sécheresse, pas assez de pluie pour cultiver.
Jadis nous pensions que le pire problème qui puisse arriver était celui de la sécheresse, mais aujourd’hui, avec le terrorisme tout s’écroule. Avant, pour pallier à la sécheresse, nous avions toujours des solutions : le tourisme, des aides internationales dans tous les domaines, mais avec le terrorisme tout s’est arrêté.
Les ONG, les organisations internationales ne viennent plus ici pour aider. Les gens de l’Adrar, de la région, restent enfermés dans cette immensité comme dans une prison. La vie devient très difficile."
Ref. : maur-6303
Quelles sont les conséquences de l’arrêt subit du tourisme pour la bibliothèque ?
"- C’est grâce au tourisme que le patrimoine culturel de Chinguetti est devenu célèbre. C’est Théodore Monod qui a demandé à mon père d’ouvrir notre bibliothèque aux touristes pour faire vivre ce patrimoine jusque là oublié dans une pièce sombre, dans des coffres en bois attaqués par les termites… Après ça, les bibliothèques de Chinguetti ont commencé à reprendre, le tourisme a aidé. Nous avons eu des volontaires venant par charters pour nous montrer comment entretenir, comment protéger ce patrimoine culturel. Il y a eu des interventions importantes, et maintenant tout est arrêté, on en revient à l’ancienne situation avant le tourisme. Les livres se dégradent à nouveau, c’est cela aussi qui nous inquiète ; et nous avons un autre problème grave : des collectionneurs viennent proposer des prix incroyables pour acheter des manuscrits et tout le monde ne peut lutter contre la pauvreté."
Ref. : maur-6306
Ref. : maur-6318
Ref. : maur-6322
Le tourisme a t-il toujours été accepté par tous ?
"A Chinguetti, au départ, il est vrai que certains vieux étaient contre le tourisme. Ils disaient que ça allait tout gâter, détruire les traditions, détruire les nouvelles générations qui ne sont pas bien protégées culturellement contre la mondialisation, les traditions de l’extérieur mal vues par la population de Chinguetti.
Ces vieux-là, à l’arrêt du tourisme, ont constaté qu’ils s’étaient fait de fausses idées. Ils ont compris l’importance du tourisme du moment qu’on protège nos jeunes des effets indésirables d’un tourisme de masse. Ils ont compris que prendre ce qui est bon, ce qui est positif : les échanges avec les autres civilisations, nous aiderait à résoudre de nombreux problèmes de notre vie quotidienne."
Ref. : maur-6326
- Avant que le tourisme ne se développe en 1996, la majorité de la population de Chinguetti était constituée de vieux et de femmes.
Grâce au tourisme, de nombreux jeunes sont revenus vivre ici. Ils ont trouvé du travail dans le domaine touristique. Cela a fait revivre Chinguetti.
A l’arrêt subit du tourisme en 2007, l’émigration a repris vers Nouakchott et les grandes villes. La sécheresse perdure, on ne peut toujours rien cultiver dans nos jardins, sous les palmiers. Nous n’avons plus d’eau et le tourisme s’est arrêté.
On peut lutter ainsi un an, deux ans, sans travail, mais à la fin on est bien obligé de chercher une solution pour survivre. Les jeunes sont aujourd’hui contraints de retourner dans les grandes villes ; et encore, ceux qui ont la chance de trouver un travail à Nouakchott ou à Nouadhibou. Ce n’est tout le monde qui trouve du travail là-bas.
Mais ils restent à l’écoute au cas où le tourisme reprendrait à Chinguetti. On garde cet espoir pour résoudre les problèmes de la vie des gens d’ici.
Ref. : maur-6328
Vous avez évoqué Théodore Monod, connaissez-vous Maurice Freund ?
- Maurice Freund est très célèbre dans la région de l’Adrar. Il a fait beaucoup. C’est grâce à lui que le tourisme est venu en Mauritanie avec les charters. Ca a été une grande intervention économique qui a fait revivre la région de l’Adrar qui était oubliée victime de la sécheresse et la désertification pendant des dizaines d’années. Les charters de Point Afrique ça a considérablement aidé les gens a améliorer leurs conditions de vie, à résoudre leurs problèmes économiques. On lui demande toujours de faire le maximum pour aider les gens de l’Adrar qu’il connaît très bien ; il connaît les guides, il connaît les aubergistes, il connaît les populations ici, les vendeurs, les nomades qui ont vraiment besoin de ces aides, de ces ONG qui aident les gens dans la brousse, pour les soins, et dans les villes aussi, pour faire revivre les hôtels, les auberges. Parce que tout est mort actuellement.
Si Théodore Monod a fait beaucoup spirituellement pour l’Adrar, Maurice Freund, lui, à fait beaucoup économiquement pour l’Adrar. Théodore Monod a rendu l’Adrar célèbre grâce à ses écrits et à ses recherches, surtout la météorite de Chinguetti. Maurice Freund c’est avec ses charters et ses interventions qu’il a rendu l’Adrar célèbre !
Ref. : maur-6334
Melainine Ould Mohamed El Wali, de quelle façon envisagez-vous l’avenir ?
- On garde l’espoir, malgré tout. J’espère que tous comprendront que les Chinguettiens sont toujours les Chinguettiens. Rien n’a changé, ni dans la mentalité, ni dans les habitudes, ni dans les traditions.
Nous restons un peuple de paix, un peuple musulman, musulman, musulman. Pour nous, l’Islam c’est la paix.
La ville de Chinguetti était un centre caravanier, un carrefour de routes qui relient l’Afrique du Nord avec celle de l’Ouest… Les caravanes de pèlerinage. Avec le tourisme, on peut dire que la ville a repris sa tradition, son rôle d’échange entre plusieurs civilisations, avec des gens qui viennent de tous pays, des échanges culturels importants…
Conserver un tourisme de qualité, un tourisme culturel, c’est positif pour nous, ça aide beaucoup. La ville a toujours été ce lieu d’échange.
Ref. : maur-6350
Ref. : maur-6293
Ref. : maur-6335
Ref. : maur-6388
Avant de reprendre l’avion, nous sommes curieux de découvrir la petite agence de notre guide Sid’ahmed. Nous lui demandons de nous y mener.
Nous découvrons tout près de l’aéroport d’Atar, de l'autre côté de ce portail, un lieu accueillant, l’agence INIMI, composé de trois grandes et vastes pièces tapissées, deux belles raïma d’un blanc éclatant, une jolie cour où trône un majestueux bouquet de basilique dont l’arôme se répand dans l’espace inexorablement vide.
Zone rouge :
le tourisme, une arme pour la paix ?
Adrar Mauritanien, février 2012
Ref. : maur-6164
La belle Wadane s'en étonne. Ils déambulent par petits groupes - bardés d'appareils enregistreurs de toutes sortes - s'égarent dans son dédale de pierres couleur de terre brûlée. Étrange cortège de voyageurs qui fera un aller-retour pressé de quatre jours : Atar, Wadane, Chinguetti, bravant les recommandations du Quai d’Orsay.
Ici, dans l’Adrar mauritanien, on fête en compagnie du vent de sable la seconde édition du Festival des villes anciennes.